Par Jeanne Hardy.
Ces derniers jours, je repense avec nostalgie à mon été dernier. Ma semaine de vacances fin juillet 2024, entre baignades à la plage et coup de pédale à toute vitesse pour ne pas rater la finale du 100 m. Je me surprends à regarder à nouveau quelques anciens exploits de sportives qui m’ont fait vibrer, plus jeune. Mes premiers souvenirs olympiques ont la forme des sauts d’Emilie Le Pennec sur le praticable d’Athènes en 2004. Je sens encore l’odeur de mes goûters d’été, postée devant la télé à regarder Blanka Vlasic, championne de saut en hauteur, voler au-dessus d’une barre à plus de deux mètres du sol devant un public en effervescence. La puissance folle, un stade entier qui vibrait derrière ces corps de femmes. C’est chose rare. Je revois Laure Manaudou mettre tout un pays d’accord. Je repense à Marie-Josée Perec dont je n’ai pas connu les exploits, mais dont le récit de ses courses suffit à me faire rêver.
Moi aussi, je voulais être championne olympique. L’été, tous les quatre ans, le jardin se transformait en parcours imaginé pour des sauts, des courses et des lancers en tous genres, des épreuves plus créatives et tordues les unes que les autres.
Les championnes. Elles ne savent peut-être pas à quelle catégorie elles appartiennent. Dans le geste, parfaitement exécuté. Dans le geste, connu, répété, maîtrisé, réalisé aux yeux de tous et toutes, mes yeux brillent d’admiration. Entre mon corps et la télévision, un espace s’est glissé. Comme toujours pendant les concours sportifs retransmis à la télé - l’espace d’un éblouissement mêlé à un emballement irrésistible.
Elle court, elle court.
Elle trace une ligne avec ses pas.
Elle nage, elle nage.
Des étincelles d’eau jaillissent depuis ses pieds.
Elle saute, elle s’élance, elle tourne en l’air.
Elle trace des cercles avec son corps.
On dirait qu’elle prend la piste pour du papier. Et ses bras pour des ciseaux, elle découpe l’air, elle fuse, j’ai cru qu’elle avait décollé du sol.
L'été dernier, j’en avais profité pour me mettre à jour sur une histoire que je connaissais mal : celle des femmes avec les Jeux Olympiques. Il semblerait que ce soit une histoire ardue (étonnant ?). Spectaculaire chemin, d’une exclusion totale, à la parité quasi-complète entre les athlètes l’année dernière, pour les 33e olympiades de l’ère moderne. Les premières femmes ont été autorisées à concourir seulement en 1912. Le Comité International Olympique avait validé leur participation à deux épreuves de natation et une de plongeon. Et c’était en 1960, seulement, pour les athlètes paralympiques.
L’histoire des femmes et des Jeux Olympiques a longtemps été bordée de préjugés sexistes et d’interdictions. Certaines, trop performantes sont accusées d’être des hommes. Certaines, trop rapides, trop musclées, sont accusées de ne pas être de “vraies femmes”.
Mais l’histoire est parfois belle, semée de grandes premières mémorables. De records. Et de médailles. La première médaillée d’or de l’histoire olympique était la tenniswoman britannique Charlotte Cooper.
J’admire celles qui ont le courage d’être des femmes honnêtes. Celles qui assume la fragilité du mental, l’impossible surpuissance totale et permanente du corps et de l’esprit.
Je voudrais parler de Simone Biles, gymnaste star américaine. Elle repousse les limites de la pesanteur. Je voudrais parler de Sifan Hassan, de cette femme dont le mot puissance ne suffit pas à décrire ce qu’elle est capable d’incarner. L’athlète hollandaise a couru pour la première fois sur quatre disciplines : 1.500 m, 5.000 m, 10.000 m, en terminant par un marathon. En remportant le Marathon. Combien de kilomètres parcourus sur quelques jours ? Derrière son masque, derrière chaque mouvement de son corps, je ne peux rien percevoir de ce qui se passe à l'intérieur d’elle. Je ne sais rien des enjeux que représente ce moment pour elle. Je ne peux qu'essayer de le deviner. Je ne devine rien de sa souffrance. Tout semble facile. Elle glisse sur la piste.
Je voudrais parler des françaises : Pauline Déroulède, Cassandre Beaugrand, Clarisse Agbegnenou, Shirine Boukli, Amandine Buchard, Marie- Amélie Le Fur, Manon Apithy-Brunet etc. Tous ces noms que je ne connaissais peu, voire pas du tout, avant l’été dernier.
Et TOUTES les autres. Encore plus de femmes fascinantes composent désormais mon répertoire des héroïnes.
Elles m’impressionnent. Elles sont belles à regarder. Une femme qui maîtrise sa discipline, excelle et domine un champ d’action ou un sujet, il n’y a rien qui me fasse autant vibrer. Le mot championne n’a jamais eu autant de force à mes yeux que lorsque je vois ces femmes derrière mon écran.
Cette année, je réalise aussi la médiatisation du Tour de France féminin, sur les grandes chaînes. Quand j’étais petite et que mon père regardait le Tour de France, on était loin de voir des femmes à l’écran. Le monde du sport féminin semble attirer une attention et une reconnaissance sans précédent et c’est réjouissant. Selon, le site ONU femmes, aujourd’hui, 7 personnes sur 10 affirment regarder le sport féminin bien que les filles arrêtent toujours plus facilement le sport, enfant, que les garçons.
Vibrer devant la télévision face aux exploits des femmes, encouragera, je l’espère, la pratique sportive des femmes et des jeunes filles.
Alors que les championnes se préparent, ma télévision est déjà prête pour les prochains Jeux Olympiques.
Jeanne Hardy
Nous vous souhaitons un très bel été et nous vous retrouvons à la rentrée pour vous faire découvrir de nouvelles plumes et la suite de notre programmation évènementielle dans votre ville.
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